Libre comme l\'Eire

Je ne fais pourtant de tort a personne

En laissant courir les voleurs de pommes

Mais les braves gens n'aiment pas que

L'on suive une autre route qu'eux...

"La Mauvaise reputation"

Ils m'ont rappele Brassens, mes voleurs de pommes¡­

Je n'ai pas tout raconte de mes aventures a Galway. Dans les auberges de jeunesse irlandaises, on trouve plus de francais que d¡¯irlandais. Dans celle de Galway, la langue francaise etait omnipresente. C'est dans la chambre que je rencontrai mes voleurs de pommes. Ils jouaient au Pouilleux, vous savez, ce jeu de cartes que l'on joue dans l'enfance ?

Et ils s'amusaient bien. Et ils m'amusaient bien. Jeunesse pleine d'eclat et d'eclats de rire, gentilles taquineries, a table ou dans les pubs alentour, plats improvises, pates a toutes les sauces, sacs de camping hauts comme des tours de Babel, ils etaient la jeunesse fauchee et faucheuse : petits savons de chambres d'hotel, lessive improvisee dans les toilettes, ils chipaient les pommes du petit-dejeuner pour un quatre heures frugal comble par la chaleur des bons copains.

Leurs chaussures ont battu tous les paves du monde, et toute la terre, qui colle encore a leurs talons.

Et ils m'ont acceptee parmi eux, moi aussi chipeuse attachante (surtout les  amandes chocolatees des salons de the, dans le bocal, sur le comptoir, avec le regard complice d'une vendeuse gourmande, mais jamais de pommes, hein, jamais de pommes.)

Ils m'ont offert des pates et du the. Jamais je n'avais rencontre personnes si genereuses : ils n'ont rien et ils offrent, comme ca, du the et des pates a une fille qui passe.

Puis vint l'heure des pubs, la musique, le sucre et l'alcool, danses et chansons improvisees, et deja il est temps de se dire au revoir.

Mes voleurs de pommes ont confirme les dires d'une irlandaise rencontree dans un bus:

"A stranger is just a friend you don't know."