LES MAGNIFIQUES
Vous direz que c'est un peu exagere. Pas si sur. En voyant tant de jeunesse, et tant d'esprit parfois, leur sourire surpris a l'une de mes extravagances, je ne peux que les appeler ainsi.
Depuis l'enfance, je reve d'un cheval que j'ai vu dans un certain film de Cocteau
Le cheval s'appelait le Magnifique. Il pouvait emmener son cavalier partout ou il le demandait, pourvu qu'il lui murmure a l'oreille : "Va ou je vais, le Magnique, va, va, va !"
Je me suis toujours etonnee de la beaute de mes eleves, et mes etudiants cette annee n'echappent pas a la regle. Comme le cheval de Cocteau, ils me font voyager. J'ai l'impression de retrouver mes eleves du Yorkshire l'annee suivante, lyceens devenus jeunes adultes presque sous mes yeux.
Mes etudiants viennent de partout, Turquie, Japon, France meme, les prenoms gaeliques se succedent et ne se ressemblent pas, pour donner une musique irlandaise a l'ensemble. J'ai pense a les appeler simplement les beaux gamins, car ils ont cette force jeunesse qui les rend eclatants. Mais que dire dans ce cas de mes etudiants du soir ? Ceux-la ont l'age de mes parents, et une sagesse que je leur envie. De l'autre cote du bureau, je fais juste semblant d'avoir des choses a leur apprendre. J'apprends tout autant d'eux. Quand aux Magnifiques en journee, ils m'enseignent egalement. Tous ont choisi des chemins differents, etudients des matieres variees, comme les sciences politiques, le genie civil, le gaelique, l'histoire de l'art ou les maths. Et quand je lance un debat en francais, c'est dix points de vue differents qui jaillissent dans la classe, dans un francais fluide pour certains, alambique pour d'autres.
Quant a la litterature, certains m'ont offert un nouveau regard sur le toutou de Maupassant,
le vieil homme de Yourcenar,
ou l'insolence de Colette
Et je vous laisse ici, car il me faut travailler sur Camus pour demain...